La météo n’a pas annoncé de pluie hier soir et Bastien soupire en observant les trombes d’eau qui tombent des nuages sombres qui recouvrent la capitale français. Il maudit vaguement les mauvaises prédictions météorologiques en rangeant ses affaires dans son sac. Il attrape les copies que les élèves lui ont rendu quelques heures plus tard après avoir pendant une bonne heure sur des équations qu’il a piochées dans plusieurs manuelles – et pour certaines inventées. La première de la pile attrape son regard et il la parcourt rapidement. Il grimace face au résultat – et une partie de lui se demande comment ce résultat a-t-il pu être trouvé non parce que sérieusement – avant de les fourrer dans son sac. Il se connait, il serait bien capable de se réinstaller à son bureau et corriger le paquet et rentrer chez lui la nuit tombée. Néanmoins, il n’a pas envie de s’attarder au lycée par un temps pareil et le seul avantage que la pluie a, c’est de rendre son chat affectueux et pour une fois que cette boule de poils n’essaie pas de lui griffer le visage, il peut bien en profiter. Il imagine sa soirée passée dans son canapé, son chat calé contre sa poitrine a zappé de chaine en chaine tout en corrigeant les copies de ses élèves et en mangeant peut-être une pizza. Ce plan lui convient parfaitement, un peu de simplicité dans sa vie pour oublier quelques secondes le bazar qu’est devenue sa vie. Oublier un instant qu’au milieu de ses élèves se trouve un garçon aux cheveux blonds qui le dévore du regard. Ce garçon avec qui il s’est compromis. Oublier que le frère de ce garçon fait battre son cœur un peu plus vite. Il soupire tout en se pinçant l’arête du nez. Parfois sa vie ressemble à une de ses espèces d’histoires romantiques qui font glousser les filles et ça a le don de le déprimer. Profondément. Il sort de sa salle de classe après avoir récupéré toutes ses affaires et se dirige vers la sortie. Il ne croise pas un chat en se dirigeant vers le parking. Il s’arrête devant la porte et resserre sa veste autour de lui. Il se promet de sortir l’écharpe demain, ne souhaitant pas attraper un rhume. Il ne manquerait plus que ça, pense-t-il sombrement avant de sortir et de courir le plus vite possible vers sa voiture. Il ne se fait presque pas mouiller – les avantages de courir deux fois par semaine – et lance le chauffage dès qu’il a mis le contact. La circulation dans Paris est un véritable enfer comme tous les jours et il braque violemment pour éviter l’idiot qui brûle le feu. La voiture lui tape véritablement sur les nerfs et il regrette de ne pas avoir pris le métro. Sauf qu’en réalité, il hait certainement le métro encore plus que la voiture. Toute cette promiscuité le dérange et il est fatigué des plans dragues plus lourds les uns que les autres. Il se sait attirant mais dans ces moments-là, il a l’impression d’être un morceau de viande. Finalement, il tourne à gauche et la circulation se calme. Il n’est plus qu’à quelques rues de chez lui et c’est là qu’il l’aperçoit. Il reconnait sa façon de marcher, ses vêtements – il l’a croisé plusieurs fois aujourd’hui qu’il a enregistré ses fringues ce qui peut paraître légèrement inquiétant. Il est trempé par la pluie et Bastien sent quelque chose le tirailler. Il pèse le pour et le contre avant de soupirer, désespéré par lui-même et avec l’immense certitude qu’il va le regretter. Mais le gosse n’a que dix-sept ans et il n’est pas un monstre. Qui sait où ce gamin crèche. Il va se garer quelques mètres plus loin – heureux qu’il n’y ait pas de circulation sinon il se serait fait klaxonner. Il ouvre la portière quand le gosse arrive à sa hauteur. « Allez monte ! »

Se poser des questions, encore et encore. Voilà ce qu’était la filière STI. Mais aujourd’hui ce n’était pas des questions de maths ou de mécanique qui me faisait réfléchir mais bien le professeur de maths, Bastien. C’était pour lui que j’étais monté sur Paris. C’était pour lui que j’avais tout plaqué en Auvergne. Et ça, il ne l’avait pas compris. Je le regardais, toujours, sans rien dire. Je n’étais pas le roi des bavards, on pouvait facilement m’oublier et ce n’était pas un mal. Je pouvais regarder Bastien comme je l’entendais. Je ne savais pas ce qui m’avait rendu amoureux de lui. Mais depuis, je ne pouvais plus me passer de le regarder, l’admirer. Les cours, c’était une véritable torture. Mais je devais faire avec, ne rien faire, sinon il allait fuir encore. Je savais bien que c’était à cause de moi qu’il avait fui Clermont. Depuis, je ne lui avais pas reparlé. Et je n’allais pas le faire. Pas tout de suite, je n’étais pas prêt. Je soupirais, voulant que ce cours se finisse au plus vite. Le temps était pluvieux et je n’avais pas prévu de parapluie ni de capuche. Je m’en fichais totalement. Il y avait beaucoup de chose dont je me fichais. Ma vie était sans intérêt. Des fois je me demandais pourquoi je vivais, des fois, je me moquais de moi-même. Le mec qui m’avait insulté dans le train, cet été, avait bien raison. Personne n’était au courant de ça. Je ne l’avais dit à personne mais finalement monter à Paris, avait été une bonne chose.

Je marchais dans la rue, sous la pluie, me posant de plus en plus de questions sur moi-même. Pourquoi je restais là, en cours. Au final, ça ne me servait à rien. Mais rien du tout. Je pensais déjà annoncer à Thomas que j’allais abandonner le bac, tout abandonner d’ailleurs. Mais je l’imaginais déjà en train de le répéter aux parents. Soudain, un son de voix me réveilla de mes pensées, et avec surprise, je vis Bastien. Je le fixais avec surprise. Pourquoi il me parlait maintenant ? Je montais néanmoins, et j’évitais de le regarder avant de lancer un vague :

« Merci »


Déjà, ça me confortait dans l’idée de quitter le bac. C’était une véritable torture d’être à ses côtés. J’avais envie de lui sauter dessus mais je ne pouvais pas. Pas maintenant.

Le silence dans la voiture est lourd, renforcé par la pluie drue qui s'abat sur la voiture. Bastien meurt d'envie d'allumer la radio mais il a comme l'impression que ce serait déplacé. Bien sûr, pas plus que de faire monter un de ses élèves dans son véhicule alors qu'il est impliqué avec ce dernier, ce dont il n'est pas fier mais d'une certaine façon, il n'arrive pas à nier sa responsabilité dans toute cette histoire. Il jette un regard en coin à Arthur et retient un soupir. Quand l'adolescent est venu lui demander des cours particuliers en maths, Bastien n'a pas réfléchi outre mesure et a accepté. Bien sûr, si un élève a besoin de lui, il est là pour l'aider. Mais après plusieurs semaines de progrès zéro malgré des exercices très facile, Bastien a commencé à se questionner sur Arthur. Il a évidemment regardé ses notes pour comprendre ses difficultés et en a trouvé la raison bien qu'il ne l'avait pas vue venir. Les notes d'Arthur ont chuté du jour au lendemain un peu près au moment de son arrivée. Pas besoin d'être un génie pour additionner un plus un. Pour autant, il n'a rien dit. Il a laissé coulé en pensant que les choses se tasseraient. Alors quand Arthur l'a embrassé... Il a fui. Bastien sait qu'il n'a pas agi en adulte raisonnable ni même en professeur exemplaire. Il aurait dû parler avec lui, avoir cette conversation horriblement gênante même pour lui mais il n'en a rien fait et le voilà, derrière le volant à se demander ce qu'il doit faire.

Le silence est de plus en plus pesant et finalement, Bastien pousse le chauffage au maximum. Le bruit de la ventilation atténue un peu le fracas de la pluie et remplit l'habitacle d'air chaud ce qui n'est pas du luxe. Trempé comme il est, le gamin doit trembler de froid pense Bastien en lui jetant un autre regard en coin. Très vite, le chauffage lui monte à la tête et la température devient presque insupportable pour lui mais il refuse de faire un geste pour l'éteindre. Il va pour mettre son clignotant à droite mais s'arrête net. Maintenant qu'il a pris Arthur avec lui, que doit-il faire ? Le plus logique serait de lui demander où il habite mais Bastien ne peut pas se résoudre à faire cela. Comme si parler au garçon est littéralement terrifiant. Il n'ose pas dire un mot, une boule dans la gorge et retient l'envie de se pincer l'arête du nez. Il hésite encore quelques secondes avant de ne plus avoir le choix et de tourner à droite. Quelques mètres plus loin il se gare devant son immeuble et coupe le moteur. Le silence est soudain si assourdissant que Bastien sort rapidement de la voiture sans un mot pour le garçon ni même un regard. Il se hâte vers l'entrée et compose le code avant d'ouvrir la porte qu'il laisse ouverte, les yeux rivés vers le sol. Il va le regretter pense-t-il une nouvelle fois mais bien vite, il glisse la clé dans la serrure de son appartement, Arthur juste à côté de lui. Il le laisse rentrer et referme la porte. « Tu peux rester le temps que la pluie se calme. » Lance-t-il sans le regarder. Il baisse les yeux quand il sent quelque chose contre sa jambe. Son chat miaule et il va pour le caresser quand celui-ci se carapate vers Arthur, visiblement plus intéressé par le nouveau venu que par son maître. Chat ingrat va. Finalement, il pose enfin son regard sur l'adolescent. « Tu veux une serviette pour te sécher un peu ? »

Et le silence perdurait. Et je restais perdu dans mes pensées, je devrais peut être lui dire que j'allais tout abandonner du jour au lendemain. Peut être que ça se passerait mieux ou peut être pas. Ce silence si pesant, ne m'allait pas. Pourtant j'attendais d'être chez lui pour parler, pas avant, je pensais à tellement de choses avant. Je me lançais enfin et je dis :

"Je quitte le lycée, le bac, et tout ça, tu n'auras plus besoin de me voir comme ça..."

J'avais lancé ça sans réfléchir, enfin si. J'avais pas dit ça sans réfléchir. Mais je savais que j'étais le problème, son problème. Je l'avais embrassé, il était parti pour me fuir. Et j'étais là, devant lui de nouveau. Alors que je le regardais beaucoup, je sentis les larmes me monter aux yeux. Il ne comprendrait jamais. Je l'aimais, beaucoup plus que ma propre vie, et je voyais bien que ce n'était pas réciproque. Mais qui fallait il blâmer dans l'histoire? Moi? lui? Moi plus que lui, en tout cas. Je n'étais pas intéressant, je ne me trouvais pas beau.

Pourtant j'étais là , à côté de lui, chez lui. Pendant des mois, c'était mon rêve. Et là, il se réalisait. Sans rien comprendre, je me retrouvais chez lui. Et je regardais autour de moi. Enfin, je le regardais plutôt lui. Il était si beau. Alors que j'hochais la tête, je m'approchais de lui, et de nouveau je posais mes lèvres sur les siennes. Je ne me pouvais pas m'en empêcher. Mais je frissonnais de froid en même temps. Trempé, mais un semblant heureux, je regardais ailleurs. Inquiet, anxieux, de voir sa réaction. Allait il encore me fuir? Sûrement. J'en étais tellement sûr.

Alors j'allais dans mon coin, je fixais le sol, les larmes coulant le long de mes joues. De toute façon, ça m'était égal désormais. J'allais quitter le lycée, le bac, ma vie peut être. Mais ça, hors de question que je lui dise. Et maintenant, je devais aussi l'annoncer à mon frère, et c'était un autre chapitre de cette histoire qu'était la mienne.

Son chat finit par s'éloigner devant le manque d'intérêt plus qu'évident d'Arthur pour lui. Il part en remuant la queue, l'air outré et Bastien retient un sourire narquois. Tant mieux sale bête, ça t'apprendra à ignorer ton maître, pense-t-il avant de reporter son attention sur l'adolescent prostré. Celui-ci est en train d'inonder son salon et semble figé comme une statue si bien que Bastien trouve la scène presque effrayante. Il se sent très vite gêné, une affreuse envie de lui faire proposition après proposition pour combler le silence et essayer de le dérider un peu. Arthur lui a toujours donné cette sensation d'être mal dans sa peau. La période de l'adolescence n'est clairement pas facile pour tout le monde, surtout quand on est gay. Et malgré le fait qu'Arthur l'effraie au moins deux fois sur trois - parce que cette situation est compliquée et Bastien n'est pas vraiment doué pour gérer le compliqué, surtout avec un gamin imprivisible, mineur et affecté à sa classe - il ne peut pas nier avoir de l'affection pour lui. Il est doué en maths, il en est certain même s'il a prétendu le contraire et a certainement d'autres capacités. Il est juste perdu et Bastien veut l'aider. Il veut se rattraper après avoir pris la fuite et ne pas avoir été l'adulte qu'il se doit d'être auprès de lui. Il envisage d'aller la serviette quand finalement, Arthur prend la parole. Le brun écarquille les yeux, choqué par la décision. Il a envie de crier pas question comme un parent mécontent, comme si son propre fils venait de lui annoncer cette décision des plus ridicules mais il n'en a pas le temps.

Soudain, Arthur est sûr lui et l'embrasse de nouveau. Bastien cligne des yeux surpris. Ses lèvres sont glacées comme la dernière fois et les gercures rugueuses irritent presque les siennes. Il hésite à la repousser ou à le laisser se décourager en restant de marbre avant de finalement de reprendre ses esprits pour de bon et de poser gentiment sa main contre son épaule pour l'éloigner. Il ouvre la bouche pour parler, mais il s'interrompt en voyant Arthur partir brusquement à l'autre bout de la pièce. Il hausse un sourcil avant de soupirer devant le spectacle. Il voit le blond trembler de froid et il se demande s'il n'est pas en train de pleurer vu les sons qu'il croit entendre. Cette fois, il se pince vraiment l'arête du nez, incapable de savoir ce qu'il doit faire et plus que déstabilisé. Il l'embrasse et ensuite va pleurer et normalement, ce ne sont pas les filles qui sont sensées agir bizarrement ? En étant gay, Bastien pensait vraiment avoir évité ce problème. Il finit par tourner le dos et se dirige vers la salle de bain où il attrape une serviette avant de retourner dans la pièce principale. Il s'approche doucement d'Arthur avant de poser doucement la serviette sur les épaules de l'adolescent et de la passer dans ses cheveux pour le sécher et le réchauffer avant de le contourner et de le forcer à le regarder dans les yeux. « Arthur... Est-ce tu es venu à Paris pour moi ? Est-ce que c'est pour ça que tu veux arrêter tes études ? » Sa voix montre son inquiétude et il soupire légèrement, pas sûr d'avoir les bons mots pour cela. « Ecoute... Tu ne me connais pas Arthur. Tu ne sais rien de moi. Alors si c'est pour moi que tu fais ça, tu dois arrêter. Ton avenir est important, tu ne peux pas le compromettre pour un béguin pour un prof. » Bastien essaie de parler d'une voix douce et utilise plus de mots qu'il en a l'habitude mais il sait qu'il doit être clair avec lui. « Ce que tu penses ressentir n'est pas réel. Et c'est contre l'éthique. Si tu as besoin d'un adulte pour t'écouter, tu peux venir me voir quand tu veux. Mais jamais je ne pourrai être cette personne qui te donnera de l'amour et de l'affection. Il y a plein de jolis garçons qui voudraient t'embrasser, j'en suis certain. Mais pas moi. Je suis juste ton professeur, tu comprends ? »

Et le rêve se transforma en cauchemar. Il était là devant moi. Que se passait-il dans ma tête? Comme dans un mauvais film dramatique. Ses paroles résonnèrent en moi. Il ne voulait pas de moi. Il ne m'aimait pas. Non, ce n'était pas possible, ni même envisageable. Les larmes perlèrent dans mes yeux. Il était le seul et unique homme que j'aimais. Il n'était pas question que j'aille parler à un autre garçon, j'aurais trop peur qu'on me rejette, comme il le faisait à l'instant. Pourtant je devais répondre à ses questions, ses interrogations, tout comme il devait le faire pour moi :

"Oui c'est pour toi.. je t'aime... comme j'ai jamais aimé quelqu'un auparavant... Mais tu ne veux pas de moi... je dois être trop moche, pas assez bien pour toi... Soit, je l'accepte, mais tu ne me reverras plus jamais en cours.. j'ai pas envie de souffrir pour toi... Je souffre déjà assez..."

Je baissais le regard, et laisser mes larmes s'échapper. Je n'avais dit à personne ce qui s'était passé cet été.Mais tant pis, lui il n'allait rien dire à personne, vu qu'à part mon frère et ma cousine, personne n'était à Paris. Et je doutais qu'il sache qu'ils étaient là. Alors je me lançais:

"Mais je ne suis pas venu que pour toi.. je suis aussi venu car on m'a agressé cet été... Et tout ce que ce client m'a dit, c'est vrai.. la preuve avec toi... "

J'étais prêt à repartir. Je ne voulais pas rentrer chez moi, je ne voulais pas rester ici, mais je ne savais pas où j'allais aller.

Bastien reste stupéfait à l'entente des mots d'Arthur. Il se recule légèrement et observe le garçon comme si c'était la première fois qu'il le voyait. Et peut-être est-ce vraiment le cas. Il se rend compte que ce qu'il prenait pour un béguin et de légers problèmes d'adolescent semble être bien plus grave qu'il ne le pensait. Et au fond ce n'est pas tant ses mots qui inquiètent Bastien mais la façon dont il le dit, les sanglots qui secouent son corps. Et son sang ne fait qu'un tour quand il parle d'agression. Il retient un mot vulgaire parce qu'il hait la violence et comment peut-on adresser un adolescent. Il se force à se calmer et à réfléchir en adulte posé. Il se demande si Arthur a déjà parlé à quelqu'un de cette agression et il est presque sûr que la réponse est non. Si Arthur l'a choisi pour être la personne qui l'écoute, Bastien est plus qu'heureux de prendre le rôle bien qu'une part de lui lui souffle de fuir de nouveau parce qu'Arthur semble vraiment l'aimer pour une raison qui lui échappe. Un nouveau soupir lui échappe. Il a besoin de temps pour remettre ses pensées en ordre avant de discuter avec l'adolescent. « Arthur... Tout ce que cet homme t'a dit est probablement faux...» Bastien hésit légèrement sur les mots qu'il doit dire et il sait que comme ça, il n'a pas l'air très convaincant. Frustré, il serre légèrement un poing parce qu'il ne sait pas comment faire pour aider Arthur et ça le dévore d'être impuissant. Il est clair que son élève est têtu comme une mule et qu'en restant froid envers lui, Bastien n'obtiendra jamais rien. Mais Bastien ne peut pas être plus gentil sans encourager Arthur dans ses sentiments. Finalement, il se décide. « Eccoute, si tu allais prendre une douche plutôt ? Tu es trempé et tu vas finir par attraper la crève. La pluie n'a pas l'air prête de s'arrêter alors tu devrais te réchauffer. »

Il ne laisse pas le garçon protesté et l'entraine vers sa chambre puis dans la salle de bain attenante à cette dernière. « Les serviettes sont dans ce placard et il y a du savon dans la douche. Je vais te sortir des vêtements secs dans ma chambre et je t'attendrai dans le salon d'accord ? Prends ton temps. » Il lui sourit légèrement avant de fermer la porte et d'aller fouiller dans son armoire pour trouver quelques vieux vêtements aujourd'hui trop petits pour lui. Arthur n'a clairement pas le même gabarit que lui et s'il lui donne les fringues qu'il porte au quotidien, le pauvre garçon va flotter dedans. Il sort un t-shirt qu'il ne savait même pas encre avoir et un pantalon de jogging qui sera certainement trop grand mais il n'a pas plus petit. Il les pose sur le lit et hésite à sortir un boxer propre avant d'oublier totalement cette idée. Il a déjà peur qu'Arthur se fasse des films devant cette soudaine affection, il ne veut pas tenter le diable. Il retourne ensuite dans le salon et entreprend de faire chauffer de l'eau pour un possible thé ou pourquoi pas une soupe. Il va ensuite s'asseoir sur le canapé avant de se relever et de faire les cent pas. Il réfléchit aux mots qu'il va utiliser, aux choses qu'il doit dire. Finalement, Arthur le rejoint. « J'ai fait chauffer de l'eau. Tu veux un thé peut-être ? Café ? Soupe ? » propose-t-il gentiment avant d'aller s'asseoir sur le canapé et de faire un geste à Arthur pour faire de même, tout en essayant de garder une distance respectable. « Arthur, j'aurai besoin que tu me parles de cet homme qui t'a agressé. Est-ce que quelqu'un est au courant de ça à part moi ? »

Quand Arthur revient, il a les cheveux humides de la douche et flotte effectivement dans ses vêtements. Bastien ne peut qu'avoir le coeur serré par cette vision. Après les dernières révélations d'Arthur, ses mots brisés et les larmes qu'il a laissées échapper, le garçon lui semble soudain si fragile à pouvoir s'écrouler sous ses yeux. Il ne semble tenir debout qu'en s'accrochant à cette affection inexpliquée - et dérangeante - pour lui et Bastien se sent affreux de devoir le repousser. Clairement, ce gamin n'a pas eu assez d'amour dans la vie, n'a pas été assez aimé. Et il a choisi la mauvaise personne pour le faire. Bastien le regarde s'asseoir à côté de lui. Une part de lui aimerait pouvoir l'aider, pouvoir être cette personne. Il aimerait pouvoir passer sa main dans ses cheveux, lui murmurer des mots d'amour et l'embrasser tendrement ce que personne n'a dû faire. Mais même si Bastien le veut, l'envie n'est pas là. Il pourrait peut-être passer au-dessus de l'éthique, mais l'envie ne se présentera jamais. Même sans avoir eu de ses nouvelles, sans savoir où il est, Bastien pense encore à Thomas, qui se trouve être le frère d'Arthur. Ses sentiments sont toujours intacts et il n'arrive pas à passer à autre chose même s'il est celui qui est parti. Alors, aucune chance qu'il puisse y avoir quoique ce soit entre lui et Arthur.

Il retient un soupir et porte son regard sur l'adolescent assis à côté de lui. Son discours est confus, les mots décousus et Bastien n'est pas sûr de comprendre exactement ce qu'il s'est passé. Gentiment il passe une main sur son bras pour le réconforter, en espérant que ce faible contact humain sera suffisant. « Ne t'en fais pas. Je n'en parlerai à personne si tu n'es pas prêt. » Il voit bien que c'est un souvenir douloureux et qui sait embarrassant. Il ne peut s'empêcher de penser que les personnes victimes d'agression sont souvent honteuses. Mais à quel point cet homme a-t-il agressé Arthur ? Son sang ne fait qu'un tour à cette idée. Il essaie de chercher un seul indice dans les propos du garçon sur une agression physique mais d'après ce qu'il a compris, cet homme semble juste l'avoir dégradé et anéanti le peu de confiance qu'Arthur devait possdéder. En se répétant les paroles du garçon blond encore et encore, il comprend qu'Arthur ne se trouve pas beau et Bastien aimerait pouvoir le lui dire. Mais il sait qu'à cet instant, Arthur tentera de l'embrasser, il le repoussera et tout effort sera vain. « Ne dis pas des choses comme ça Arthur. Tes études sont importantes. Tu as toute la vie devant toi. » Mais ses mots sont inutiles et bientôt le garçon a de nouveau les larmes aux yeux. Ses paroles lui brisent le coeur mais quand il se remet à l'embrasser, plus fermement que les deux autres fois, Bastien sait qu'il doit y mettre fin. Il l'attrape fermement par les épaules et le repousse loin de lui. Il voit déjà la déception sur le visage juvénile d'Arthur et prend les devants. « Arthur, écoute-moi s'il te plait. Je tiens à toi, vraiment. Plus qu'à un simple élève. Je t'apprécie vraiment et je te connais mieux que le reste de ma classe. Je suis plus que ton professeur et si tu as besoin de quoique ce soit, je serai là d'accord ? Mais je reste ton professeur et même si tu vas avoir dix-huit ans, tu restes mineur. Et même quand tu seras plus âgé, ça n'arrivera pas. Tu es un très joli garçon Arthur, crois-moi, tu feras tourner les têtes. Mais je ne ressens rien envers toi, tu ne peux me forcer. Ca ne se contrôle pas les sentiments. Et je sais bien que tu penses m'aimer, mais je t'ai dit, tu ne me connais pas. Tu ne sais pas comment je suis en dehors d'une salle de classe. » Il soupire et hésitant, repose sa main sur l'épaule d'Arthur dans un vague geste de réconfort. « Et puis tu ne crois pas que ce serait bizarre avec qu'il s'est passé avec ton frère... » Bastien s'arrête brutalement et ses yeux s'écarquillent. Merde. Et si Arthur ne savait tout simplement pas pour Thomas et lui ?

Plus la conversation avance, plus Bastien a la désagréable de s'adresser directement à un mur. Comme si à chaque fois qu'il parle à Arthur, le gamin se referme comme une huitre et n'écoute strictement rien de ce qu'il dit ce qui a tendance à l'agacer fortement. La conversation semble devenir de plus en plus inutile et la situation plus bizarre. Mais Bastien a la désagréable surprise de découvrir qu'Arthur n'écoute à première vue que ce qui peut l'arranger parce qu'au moment même où il a le malheur de prononcer le mot frère - et de se flageller à la seconde même où il le fait - il réalise qu'il a soudain toute l'attention d'Arthur. Il se mord la lèvre, quelque chose qu'il ne fait que très rarement si ce n'est quand il sait que les choses vont affreusement déraper. Avec des yeux presque horrifiés, il regarde Arthur alors que ce dernier hurle d'un cri qui le glace de l'intérieur. Ca n'a presque rien d'humain et Bastien n'a même pas la force de se demander ce que ses voisons vont penser. Il ne sait même pas ce qu'il pense. Il s'attendait à des reproches, des larmes, des insultes mais pas ce lon cri déchiré comme si Bastien venait de le poignarder. Il ne bouge pas d'un cil quand le blond s'enfuit en courant. Il lui faut quelques secondes pour revenir à lui quand l'eau qui chauffe fait un bruit menaçant et qu'il réalise qu'il a oublié de l'éteindre. Il se lève et soupire fortement. Qu'est-il supposé faire maintenant ? La situation semble le dépasser qu'il veut tourner le dos à ce garçon. Il n'a jamais rien demandé après tout dans l'histoire et tout ça lui a coûté Thomas. N'a-t-il pas assez donné de lui-même ?

C'est quand il entend un klaxon résonner dans la rue et que par la fenêtre il aperçoit la maigre silhouette d'Arthur qu'il sait que c'est tout simplement impossible pour lui de tourner le dos à toute cette histoire. Même si ça l'agace énormément. En fait, réalise Bastien, il est plus qu'agacé. Il peut sentir la colère courir dans ses veines et en fermant les yeux, il sent le sang pulser dans ses tempes. Bastien n'est pas quelqu'un qui se met facilement en colère mais une fois qu'il l'est, on regrette de l'avoir poussé à bout. Il sort de son appartement en trombe, claquant la porte, se fichant des reproches de ses voisins qui tomberont dans la soirée. Il se précipite dehors et est vite trempé par la pluie. Il n'a pas pris de veste et le polo qu'il porte ne le protège que peu mais il s'en fiche. Il traverse la rue sans faire attention aux voitures et suit le chemin qu'Arthur a certainement dû emprunter. Il a raison parce qu'il le voit finalement à quelques mètres de lui sur le banc d'un parc. Il n'y a pas un chat - par ce temps ce n'est pas si étonnant - mais c'est tant mieux parce que personne ne veut certainement entendre Bastien crier. Il sert les poings et s'approche de l'adolescent, si bouché qu'il en est tellement agaçant. « Debout ! » exige-t-il. Sa voix est cassante et il a perdu toute sa patience parce qu'il n'attend pas qu'Arthur lui obéisse. Il l'attrape durement pour le bras, serrant certainement trop fort et le force sur ses pieds avant de l'agripper par les épaules, le regard noir. « Maintenant tu vas m'écouter parce que j'en ai plus que marre de me répéter. A ton avis, si je ne tenais pas à toi, est-ce que je t'aurai couru après par ce fichu temps ? D'ailleurs quel mec courrait après un fichu adolescent mal élevé et têtu comme un âne s'il ne tenait pas à lui ? Ose-moi le dire le contraire. Mais merde grandis un peu Arthur. » Bastien se retient de véritablement hurler et s'il est rarement vulgaire, il fait passer sa frustration par des jurons. C'est mieux que de se mettre vraiment vraiment en colère et de mettre la trouille de sa vie à gamin. « Tu ne peux pas m'en vouloir de ne pas t'aimer comme toi tu m'aimes. Mais ça ne veut pas dire que je ne tiens pas à toi. Alors maintenant tu vas ramener tes fesses dans mon appartement et on va discuter en écoutant l'autre. Compris ? Parce que je ne le répéterai plus. »

Bastien ne sait pas exactement à quoi il s'attendait après ce coup d'éclat. Bien sûr, il espère sur le moment qu'Arthur le suive docilement. Mais Bastien sait que ce serait trop simple et effectivement, Arthur n'en fait que sa tête. Il se met en colère à son tour et Bastien sert les poings quand il aborde sa relation avec Thomas. Défintivement, c'était une très mauvaise de lui dire bien que cela ait été accidentel. Néanmoins, ce n'est pas une raison. Thomas n'a rien à voir dans tout ça. Il ne sait pas ce qui s'est passé entre son frère et Bastien. Pour l'amour de Dieu, Bastien est parti sans rien lui dire, même pas un au revoir. Cette idée lui brise le coeur. « Thomas n'y est pour rien dans cette histoire. Si tu veux t'en prendre à quelqu'un, c'est à moi. » Bastien grogne presque cette phrase et toute son attitude protectrice lui montre juste qu'il a encore des sentiments pour le jeune homme. Bastien essaie de ne pas penser à tout ça maintenant, ce n'est vraiment pas le moment. Il relâche Arthur au moment où ce dernier se plaint mais ne s'excuse pas. Bastien n'est pas violent mais il est tellement en colèr maintenant qu'il ne peut pas dire ne pas avoir voulu le plus jeune. Il aimerait tellement lui faire rentrer un peu plomb dans la cervelle à celui-là. Il espère vraiment qu'il le suivra en haut pour qu'ils puissent discuter, Bastien veut en savoir plus sur cette agression pour s'assurer qu'Arthur va bien - mais de qui se moque-t-il, c'est évident que non, il ne va pas bien.

Soudain le gamin se propulse dans ses bras et Bastien titube légèrement, sous le choc. Il hésite sur la démarche à suivre. Il décide de ne pas le repousser - il a vraiment besoin d'affection et tant que cela reste platonique il peut lui donner ce qu'il veut - mais ne retourne pas l'étreinte, les bras ballant alors qu'ils restent tous les deux sous la pluie drue. Ils sont définitivement trempés cette fois. Il soupire en entendant les mots presque étouffés d'Arthur contre sa poitrine. C'est encore le même discours et Bastien ne sait plus quoi dire. La part égoïste de lui veut laisser tout ce bazar derrière lui. Il pourrait lui dire qu'il comprend, tourner le dos mais il sait qu'il ne pourrait jamais se le pardonner ni même se regarder dans une glace par la suite. Doucement, comme s'il avait peur de briser le garçon contre lui déjà bien amoché, il pose sa main sur son épaule dans un geste réconfortant mais aussi pour s'écarter un peu. Il veut le regarder dans les yeux, espérant qu'Arthur finira par comprendre. « Ecoute Arthur, ça n'a rien à avoir avec Thomas. Même s'il n'était pas dans l'équation je ne voudrais pas sortir avec toi. » Bastien grimace. Dans sa tête, ça ne sonnait pas si brutal mais à s'écouter, c'est affreusement dur. Il n'a jamais été très doué pour exprimer ses sentiments mais quand il s'agit d'exprimer ses non-sentiments, Bastien se rend compte qu'il est encore plus pitoyable. Il repense à un article qu'il a lu dans une revue médicale en attendant son tour chez le dentiste qui disait qu'en général les patients sont plus réceptifs à ce qu'on leur montre et Bastien sait aussi que ses élèves comprennent mieux avec des exemples. Il attrape alors la main d'Arthur et la pose fermement contre son coeur. « Tu vois mon coeur ne s'emballe pas quand tu me touches et je ne peux pas contrôler ce que je ressens. Et si tu m'aimes comme tu dis m'aimer, tu ne me forceras pas. Mais ce que j'essaie de t'expliquer, c'est que ce n'est pas parce que mon coeur ne s'emballe pas pour toi que je ne tiens pas à toi. Je veux t'aider Arthur. Je sais que tu ne vois pas comment mais je peux t'aider d'accord ? »

Plus les secondes passent, plus un fossé semble se creuser entre Bastien et Arthur. Et il a beau essayé de le franchir, Bastien n'y arrive tout simplement pas. Toutes ses tentatives se soldent pas un échec et tout ce qu'il peut faire, c'est fixer le garçon sous la pluie, toujours en train de pleurer et Bastien n'a aucun moyen de le réconforter. Enfin, si, il y a un moyen. Mais il ne peut pas lui donner. Il essaie de visualiser la scène. Si finalement, il cédait et embrassait Arthur pour que ce dernier cesse de pleurer, de se débattre. Mais tout ce qu'il peut imaginer, c'est un immense dégoût envers lui-même. Il ne peut pas faire ça à Arthur. Il ne peut pas se faire ça à lui. Mais toujours cette déchirure. Il voudrait pouvoir le faire. Il baisse la tête et fixe le sol alors qu'il écoute les mots d'Arhtur. Toujours la même rengaine. Bastien ne sait plus quoi faire. Qu'est-ce qu'il n'a pas déjà dit ? Qu'est-ce qu'il n'a pas déjà fait ? Que peut-il inventer de plus pour l'aider ? Les derniers mots du blond sont criés et Bastien sent la colère monter de nouveau en lui. Il serre les poings et va pour répondre méchamment, la frustration terrassant tout sur son passage. Il en marre, de cette conversation qui ne va nulle part. « Très bien ! Si tu veux partir, pars ! Mais je te préviens, si tu tournes le dos maintenant, je ne voudrais plus jamais entendre parler de toi. Plus jamais. Je ferai comme si tu n'existais pas. Si tu ne veux pas de mon aide, je ne vois pas l'intérêt de continuer cette mascarade. J'en ai marre de tes caprices Arthur. Je ne peux pas être ce que tu veux que je sois et je n'ai pas à m'en excuser. Maintenant, tu fais ce que tu veux. » Il crie à son tour, les derniers mots. Ses yeux fusillent l'adolescent du regard et il serre les poings. Il a l'impression que ses paroles résonnent dans ses oreilles et il expire doucement, observant l'adolescent. Encore une fois, sa maigreur, ses yeux rouges le frappent. Il sent une vague d'affection pour ce gamin le traverser et Bastien a envie de se gifler. S'il repousse l'adolescent, ils n'arriveront jamais à rien. Il sent la culpabilité envahir sa bouche, goût amer dont il n'arrive pas à se débarrasser. Il shoote dans le sol, agacé par sa bêtise et décide de calmer un peu le jeu. « Allons chercher tes affaires. » dit-il, la voix neutre. Il voudrait s'excuser mais il a l'impression que ça ne servirait à rien. Ce qui est dit est dit et il ne peut pas reprendre ses paroles. Et au fond, il a raison. Il ne peut pas s'excuser de ne pas aimer Arthur. Ils montent les escaliers en silence et une nouvelle fois, Bastien dévérouille la porte pour laisser Arthur. Et il est tellement gelé et fatigué et heureux d'être de retour chez lui au sec qu'il ne réfléchit pas. Et Bastien se maudit sur des générations à venir pour cela. Parce qu'il vient de retirer son t-shirt et que présentement il se retrouve torse nu devant son élève qui a le béguin pour lui. Bien joué Guerlain, pense-t-il. Il est comme figé, étonné par sa propre bêtise. Il se toune vers Arthur, les joues rouges et l'air embêté. Il se racle la gorge. « Je reviens... » marmonne-t-il. Il se dirige à grandes enjambées vers sa chambre avant de s'arrêter devant l'embrasure de la porte. Il pointe un doigt autoritaire vers Arthur. « Ne pars pas d'accord ? » Il s'apprête à rentrer dans sa chambre quand il s'arrête de nouveau, l'air pensif et il se retourne vers Arthur. Cette fois, il fait fi de sa partielle nudité parce qu'il a l'impression d'avoir trouvé les bons mots, la bonne chose à faire. « Je suis désolé d'avoir crié tout à l'heure mais je pensais ce que j'ai dit. Si tu ne veux pas de mon aide, si tu t'en vas maintenant, j'arrête de te courir après. Ca ne vaut pas la peine de dépenser mon temps dans une cause perdue. » Et sur ce il disparaît dans sa chambre. Il sait qu'il a été dur en paroles mais peut-être que c'est la bonne technique. La gentilesse ne marche visiblement pas alors peut-être que le bluff, les menaces donneront quelques choses. Parfois, il faut utiliser tous les moyens à bord pour réussir. Il n'a plus qu'à espérer que le gamin n'est pas parti.

Une fois dans sa chambre, Bastien se débarrasse de ses vêtements mouillés et en sort des propres qu'il enfile en vitesse. Il aimerait prendre quelques secondes pour se sécher mais il joue gros et il n'est pas sûr qu'Arthur soit encore là quand il reviendra. Il veut désespérer l'aider mais à chaque fois, il se heurte à un mur et perd ses moyens. Finalement, il y retourne, totalement habillé et avec la promesse de ne jamais refaire quelque chose aussi stupide que se déshabiller devant un élève, accident ou pas. A son grand soulagement et contentement, Arthur est encore là. Il sourit en le voyant, son premier vrai sourire de la soirée et il entraperçoit pour la première fois une lueur d'espoir. Peut-être que pour une fois, Arthur va l'écouter. « Tu es resté. » constate-t-il, montrant son appréciation. Il va pour l'inviter à s'asseoir sur le canapé de nouveau et essayer de discuter de nouveau quand le garçon s'approche soudainement et l'embrasse encore une fois. Bastien n'est plus surpris à ce stade et se retient de lever les yeux au ciel. A première vue, son non-intentionnel et très court strip-tease à réveiller les hormones du garçon. Il va pour repousser le garçon en soupirant. A ce stade, c'est plus que lassant mais Arthur s'écarte le premier et sort quelque chose qui glace Bastien au plus profond de son être. Il regarde Arthur comme s'il le voyait pour la première fois. Une envie de vomir le prend au plus profond de lui-même et il recule de plusieurs pas, comme si on venait de le frapper. La colère et le dégoût qui le submergent sont plus fort que tout. Il y a cette part rationnelle de son esprit qui essaie de prendre la défense du gamin. Il est désespéré et pas convaincant pour deux sous. Personne ne le croira mais l'idée simple qu'il veuille le forcer révolte Bastien au plus profond de lui-même. La seule raison pour laquelle il ne le frappe pas, c'est parce qu'il sait que ce serait rendre un service à Arthur. Il serre les poings, la mâchoire crispée et contourne Arthur, en prenant plusieurs mètres de large comme si, désormais, approcher l'adolescent pouvait le contaminer d'une quelconque maladie. Il ouvre la porte de son appartement et lui indique le couloir d'un geste de main. « Je t'en prie, fais-toi plaisir. » Sa voix est froide, glacée même et finalement il referme la porte parce qu'il n'a aucune intention de le laisser partir. « Ou non, encore mieux. J'ai le numéro de le proviseur sur moi. Tu peux l'appeler d'ici. Ce sera la seule chose convaincante de ton histoire. » Il fait encore quelques pas et retourne au beau milieu de la pièce. « Parce que tu as bien conscience que si tu fais ça, la police sera impliquée. Qu'ils t'interrogeront encore et encore et qu'à la moindre petite incohérence, ce sera fini. Ta parole contre la mienne. Bien sûr des preuves physiques peuvent aider. Et outre l'examen physique humiliant qu'ils te feront passer, ils n'en trouveront aucun. C'est ça que tu veux Arthur ? » Plus les secondes passent, plus sa colère perce à la surface. Ses mots deviennent plus durs, prononcés plus forts et d'un coup Bastien se retrouve à hurler. Il ne peut tout simplement pas s'en empêcher. « C'esy ça que tu veux ?! Merde Arthur ! J'essaie de t'aider. Mais maintenant... Maintenant je ne peux même plus te regarder en face. Mais à quoi tu pensais ? A quoi tu penses ? Tu crois qu'en me faisant chanter tu vas obtenir ce que tu veux, mon amour ? Tu crois qu'en me forçant, je tomberai amoureux de toi ? C'est ça ta vision de l'amour. Tu veux que je te dise. Je te détesterai. De chaque cellule de tout mon corps. » Il frappe soudainement le mur dans un accès de colère et entend les voisins répondre par un coup. Il s'en contrefiche, mieux vaut le mur et des voisins mécontents qu'un adolescent amoché et un scandale sur le dos. « Tu veux que je m'allonge sur ce canapé et que je te laisse faire ce que tu veux ? Tu sais comment ça s'appelle Arthur ? Est-ce que j'ai besoin de le prononcer ? L'idée que tu puisses imaginer faire ça à une personne que tu aimes est révoltante. Et pourquoi ? Pour ça. » Malgré sa promesse de tout à l'heure, Bastien retire rageusement son haut et le laisse tomber par terre. « C'est ça que tu veux ? Ou mon cul peut-être ? Pourquoi tu m'aimes Arthur. Tu ne me connais même pas. Tu ne sais pas qui je suis. Tu ne sais pas ce que j'aime. Tu ne sais rien de moi. » L'écoeurement se dessine sur ce visage. Bastien a conscience d'être bien foutu mais il déteste n'être considéré que comme un joli garçon. Thomas le faisait se sentir comme tout sauf un ensemble de muscles. C'est pour ça qu'il aimait le brun. « Fais ce que tu veux Arthur. Viens, sers-toi. Mais tu as perdu une chose que tu ne récupéreras jamais. Mon respect. » Il retient une remarque acide sur comment Thomas aura à jamais tout ce respect et certainement son amour. Et la seule raison pour laquelle il la tait, c'est parce que Thomas ne mérite pas d'être mêlé à cette histoire. « Maintenant, tu peux partir, tu peux rester, tu peux dire ce que tu veux. Ca ne m'intéresse plus. Tu n'es rien d'autre qu'un élève pour moi et si tu quittes le lycée, je n'aurai plus une seule raison de te parler et ça m'ira très bien. »

Bastien tremble presque sous la colère et ses poings sont tellement serrés que ses jointures en blanchissent. Il se force à respirer calmement pour ne pas faire quelque chose qu'il regretterait. Mais d'un coup, il a l'impression d'être un steack gelé balancé dans une poêle brûlante et la douleur est presque insupportable. Il se retourne sur lui-même, pas sûr d'avoir appréhendé comment Arthur est passé de devant lui à proférer des menaces - pas très convaincantes certes mais peu importe la façon dont les choses sont dites, l'ampleur des mots restent la même - à enrouler dans son canapé à pleurer toutes les larmes de son corps. Les mots qu'il entend lui brisent le coeur et la culpabilité est comme un coup en plein ventre. Ca lui coupe la respiration et pendant un instant Bastien oublie d'inspirer et d'expirer. Il regarde le spectacle qui se joue sous ses yeux avec une seule phrase qui se répète dans sa tête encore et encore. C'est moi qui aie fait ça. Il se rend compte qu'il s'est emballé, qu'il n'aurait jamais dû se mettre en colère comme ça mais il n'a pas pu se contrôler. Et maintenant voilà le résultat. Ce garçon brisé sur le canapé par sa faute. Bastien l'observe un instant et ne sait pas quoi faire, dépassé. Tout ça est trop intense. Le mot le frappe. C'est le souci. Arthur est trop intense. Dans sa façon de parler, d'agir, de penser. D'aimer. Et maintenant, Bastien le comprend un peu mieux. Il sait que ça ne doit pas être une question de physique mais qu'il est convaincu de l'aimer tout simplement. Peut-être croit-il au coup de foudre. Bastien se rend compte de son innocence, de sa jeunesse, de sa fragilité. Et c'est trop d'un coup. Il ne lui reste plus qu'une seule chose à faire.

En deux enjambées Bastien est près d'Arthur, assis sur le canapé. Il tire l'adolescent dans ses bras et le serre fort contre lui. Il se fiche de savoir si la situation est appropriée ou pas, lui torse nu avec son élève dans ses bras. Et si Arthur essaie de se débattre, Bastien ne le sent pas. Il le serre de toute ses forces et enfouit son visage dans ses cheveux. Les larmes lui piquent les yeux quand il entend les derniers mots d'Arthur. Son coeur se fissure de seconde en seconde et doucement il commence à bercer le garçon pour essayer de le calmer. « Shhhh... C'est bon... Tu vas bien... Tout va bien... Shhh... Calme-toi... Je suis désolé... Ca va aller... Shhhh... »[/color] Et il continue comme ça jusqu'à ce que tout son corps lui fasse mal. Il a une crampe dans la cuisse gauche parce qu'il est mal assis et à force de serrer Arthur contre lui il a trop chaud sans parler de sa gorge est qui ressemble à du papier de verre. Mais il s'en fiche, tout ce qui compte c'est que l'adolescent se calme. Quand il ne semble plus en proie à crise de panique, Bastien s'écarte doucement de lui et prend son visage en coupe, leurs fronts n'étant séparés que par quelques centimètres. « Je suis désolé Arthur. Je ne voulais pas m'énerver comme ça. Je sais que tu n'es pas un monstre. Tu ne ferai jamais de mal à personne. Même à ton frère. Et tu te trompes, ton frère n'a pas tout. Il a juste des choses différentes c'est tout. Je crois en toi Arthur. Je crois en toi plus qu'en quiconque. » Les yeux de Bastien dérivent sur les lèvres d'Arthur et pour la première fois, il peut s'imaginer le faire. L'embrasser. Il peut même sentir une légère envie vibrer à travers lui mais il sait qu'il ne doit pas. Ce qui vient de se passer l'a perturbé mais à tête reposée, il le regrettera et il le sait. A la place il l'embrasse sur la joue gauche. « Tu es véritablement magnifique. » Il l'embrasse sur la droite. « De l'intérieur et de l'extérieur. » Sur le front. « Et je ne te mérite pas. Tout ce que je veux c'est que tu sois heureux. Et je ne pourra jamais te donner. Mais je veux te voir tellement heureux Arthur. C'est une des choses que je désire le plus au monde. »

Bastien a l'impression qu'Arthur a cette capacité de plonger sa main dans sa poitrine et de lui arracher le coeur à chaque mot. « Je sais, je suis désolé moi aussi. Ca ira, ça va passer. » Il resserre son étreinte autour de l'adolescent et trace des cercles apaisants dans son dos pour tenter de l'apaiser même si les sanglots du blond se sont apaisés. Il aimerait pouvoir amoindrir son désespoir, le faire disparaître même mais il n'en a pas les moyens. Au fond, il se demande quelle est l'ampleur de ce désespoir. Est-il si amoureux de lui qu'il ne voit et ne pense qu'à lui chaque petite journée ? Ou est-ce que ce béguin pour lui n'est la face émergée de l'iceberg quand en-dessous se cache encore deux tonnes de glace qui se sont accumulées à chaque déception qu'Arthur a vécu. Il sent Arthur remuer contre lui et le brun le laisse faire, accueillant avec plaisir la position plus confortable. Il ne voulait pas bouger pour ne pas faire fuir le gamin un peu plus mais la crampe dans sa cuisse était à la limite du supportable. Il se retrouve assis correctement dans le dossier, le dos appuyé contre les coussins. La tête d'Arthur repose sur son torse et ses jambes sont par-dessus ses cuisses. Une des mains de Bastien est dans le dos d'Arthur quand l'autre est enroulée autour de sa nuque, ses doigts jouant doucement avec la naissance de ses cheveux. A la façon dont Arthur s'appuie contre lui, Bastien a l'impression de tenir un petit garçon perdu qui a besoin d'affection et il est certainement très proche de la vérité. Instinctivement, il resserre sa prise autour du corps frêle et reste là sans bouger, les pensées bataillant dans son cerveau alors qu'il essaie de véritablement appréhender ce qu'il s'est passé en l'espace de deux petites heures. La voix d'Arthur le sort de ses pensées et il fronce les sourcils en se demandant qui peut bien être ce il avant de se rappeler de l'agression de l'adolescent. Ses muscles se crispent à cette mention et l'envie de passer sa colère sur ce type se fait urgente. Il se calme néanmoins, à regarder les dernières minutes, ça ne lui a pas tant réussi de s'énerver. Les mots du garçon confirment son idée. Ce n'est pas tant lui qu'Arthur aime. C'est l'idée de la place qu'il pourrait avoir dans sa vie. C'est un béguin qui s'est transformé en la seule petite lueur d'espoir qu'Arthur pouvait trouver. ; au fond il ne doit pas faire la différence, il l'aime et c'est tout. Bastien fronce les sourcils à cette idée en repensant à ce qu'il lui a dit plus tôt. Arthur ne le connait certes pas mais il se fiche bien de savoir qui est Bastien. Il pourrait bien être un tueur en série, tant qu'il serait affectueux avec lui, Arthur se ficherait du reste. Cette pensée le contrarie. Comment faire comprendre à Arthur qu'il vaut mieux que ce qu'il pense de lui ? Qu'il mérite plus que de l'affection ou d'une personne qui voudra juste de lui ? Qu'il mérite une personne qui l'aime avec un grand A ? Il fait glisser sa main sous le menton du jeune homme et incline doucement sa tête pour qu'il puisse le regarder. « C'est moi que tu dois croire Arthur. » Dit-il d'une voix ferme et autoritaire mais qui ne cache pas l'affection de plus en plus grande qu'il a pour le blond. « Je ne suis peut-être pas le super-héros que tu aimerais que je sois. Je ne le serai certainement jamais. Mais tu n'as pas besoin de super-héros dans ta vie. Tu as juste besoin de personnes qui tiennent à toi. Qui s'inquiètent pour toi. » Bastien hésite à rajouter comme ton frère parce qu'il sait qu'à un moment donné, Arthur aura besoin du soutien de son frère mais ça ne semble pas être le bon moment. « Des gens qui te connaissent. Je ne suis peut-être pas la personne qui te connait mieux Arthur mais je sais que tu n'es pas un monstre et que tu es quelqu'un qui mérite d'être aimé. Enormément. » Il sourit gentiment et Bastien est sûr de ne jamais avoir été aussi tendre et attentionné avec quelqu'un si ce n'est avec les enfants, sa filleule sans aucun doute. Il jette un coup d'oeil à l'heure de son lecteur blu-ray. « Il est tard. » déclare-t-il platement. Il aimerait qu'Arthur reste ici cette nuit, il a l'air tellement fragile pour passer la nuit seul mais Bastien ne veut ni le forcer et il y a toujours cette peur de franchir une limite. Les choses se sont peut-être calmées maintenant mais il sait que c'est encore fragile et préquaire. « Tu peux rester dormir ici ce soir. Ou je peux te ramener chez toi si tu préfères. C'est comme tu le souhaites. »

Un baiser se dépose sur sa joue et Bastien se tend une seconde avant de se détendre. Arthur apparait de plus en plus comme un petit garçon aux yeux du professeur et il sait d'ors et déjà qu'à partir de maintenant, il fera son maximum pour le protéger. Les choses se sont calmées et le fait qu'Arthur admette ses problèmes fait penser à Bastien qu'ils sont peut-être sur la voie de guérison bien qu'au fond, dans ses paroles, résonne un profond désespoir et Bastien sait qu'il faudra du temps pour qu'Arthur retrouve cette confiance en soi. Et il n'y arrivera pas avec la seule aide de Bastien - il ne sait même pas par où commencer. A cette pensée, le jeune homme se dit qu'appeler son frère pourrait être une bonne idée. Ca semble surtout comme un prétexte pour revoir Thomas et Bastien a envie de se gifler pour être si égoïste dans un moment pareil. « Bien sûr que tu seras quelque chose. Ce n'est certainement pas facile mais on devient ce qu'on veut être. Tu dois juste y croire et ne pas t'arrêter à chaque obstacle. Et quand c'est trop difficile, eh bien, c'est là que tu t'appuies sur ses proches. » La voix de Bastien ne laisse pas place à la contradiction. De toute façon, il est certainement trop tard pour argumenter à ce sujet. Bastien tourne son regard vers le lecteur- blu-ray et remarque effectivement qu'il est tard. Il propose donc à Arthur de rester ici. Ce dernier préfère ne pas rentrer chez lui et Bastien prend donc ça pour un oui. « Dans ce cas, tu restes là. Tu prendras mon lit et je dormirai sur le canapé. Maintenant, on pourrait commander quelque chose ? Tu aimes la pizza n'est-ce pas ? » Gentiment, Bastien se dégage de l'étreinte d'Arthur et se lève. Il s'étire légèrement pour dégourdir ses muscles engourdis et soudain réalise deux chose. Un, il est toujours à moitié nu et d'un coup, il se sent légèrement gêné. Au fond, Bastien n'a jamais été très à l'aise avec la nudité en présence de tout le monde. Il n'y a bien qu'avec ses petits-amis qu'il se fiche des vêtements, autrement... Deux, il est encore mouillé. Son regard se pose sur Arthur. « Tu es encore trempé. » déclare Bastie clairement ennuyé. « Tu devrais retourner te doucher ou tu vas attraper la crève. Tu n'as pas besoin de te trainer un rhume. Vas-y tu connais le chemin. Je m'occupe de te trouver des vêtements secs et de commander à manger. » Bastien se rapproche d'Arthur et ébouriffe gentiment ses cheveux. « Tu as une longue journée, détends-toi un peu d'accord ? » Il lui sourit et puis houspille l'adolescent dans la salle de bain. Alors qu'il fouille dans son armoire pour trouver de nouveaux vêtements, un léger pincement au coeur en pensant à Arthur, il a soudain l'impression d'être un père célibataire avec un gamin sur les bras. Il secoue la tête pour chasser ses idées bien qu'au fond, ce ne soit pas si ridicule. Une fois qu'il a sorti de nouveaux vêtements, il va chercher le numéro d'une pizzaria parmi le fouilli de papier qui recouvre le meuble du téléphone. Il en a plusieurs - il a fait le tour des pizzerias pour délibérer l'endroit qu'il préfère - et en choisit au hasard. Ne sachant pas exactement ce qu'aime Arthur, il décide de commander deux classiques : Margherita et Reine. Finalement, il va se rasseoir dans le canapé et remet son t-shirt en se demandant comment la fin de soirée va se passer.

La pizzeria ne doit pas être très loin de chez lui - au fond Bastien n'en a aucune idée - parce qu'on sonne chez lui avant même qu'Arthur soit sorti de la salle de bain. Bastien va répondre, porte-feuille en main et paie les pizzas. Il referme rapidement la porte et va poser les deux boites sur sa table bass. Il se dirige ensuite dans sa cuisine et sort deux assiettes, des couverts ainsi que deux verres. Il hésite à prendre la bouteille d'eau avant de renoncer et de faire un deuxième tour. Il installe tout et jette un coup d'oeil à sa télé. Peut-être qu'il pourra lui proposer de regarder un film. Il est assez film d'action et science-fiction, il y aura bien quelque chose dans sa collection qui plaira à l'adolescent. Bastien fronce les sourcils. Il agit vraiment comme un père de remplacement avec le gamin et il soupire. Il n'a définitivement pas prévu de passer sa soirée comme ça et il aimerait pouvoir réfléchir calmement à la situation mais il semble que ce ne soit pas au programme. Il suppose qu'il n'a plus qu'à se fier à ses instincts pour ce soir et il réfléchira à tout cela demain, à tête reposée. Il retourne s'asseoir dans le canapé et fronce les sourcils en se rendant compte qu'Arthur est toujours dans la salle de bain. Il sait qu'il lui a dit de prendre son temps mais il n'entend plus l'eau couler. Il fronce les soucrils et hésite à aller voir si tout va bien quand il entend la porte s'ouvrir. Il soupire de soulagement et se relaxe dans le canapé. Tout va bien, se dit-il, le pire est passé. « Hey Arthur ! Les pizzas sont arrivées, j'espère que tu faim. Tu veux peut-être regarder un film. » La fin de sa phrase est étouffée par un adolescent qui vient littéralement se réfugier dans ses bras. Bastien fronce les sourcils va à ce soudain comportement mais ne le repousse pas. Il passe un bras autour de ses épaules, légèrement inquiet. « Ca va ? » demande-t-il, l'inquiétude revenant au galop. L'incompréhension se dessine sur le visage du professeur ainsi que l'anxiété alors qu'il entend les paroles plus qu'alarmantes de l'adolescent. « De quoi tu parles ? » Il passe gentiment une main dans ses cheveux pour essayer de le rassurer alors que ses paroles tournent en boucle dans son esprit. Il les assimile difficilement. Est-ce qu'Arthur pense qu'il est un danger pour autrui ? Une tâche rouge attire son regard et il ne faut même pas une demi-seconde pour que la main de Bastien se glisse sous le menton de l'adolescent et incline sa tête fermement. Il dégage ses cheveux avec ses doigts libres et son sang se glace quand il voit l'arcade sourcilière du blond ensanglantée. « Merde... » souffle-t-il, incapable d'arrêter le juron. « Arthur, c'est toi qui t'es fait ça ? » Il connait déjà la réponse et c'est ce qui l'inquiète le plus. Avec horreur, le souvenir de la conférence sur le suicide chez les adolescents à laquelle il a dû assisté il y a plusieurs années dans le cadre de sa formation se dessine dans son esprit. Il se lève brusquement et va chercher une serviette qu'il passe sous l'eau froide avant de revenir et de nettoyer la plaie. « Pourquoi tu t'es fait ça Arthur ? » demande-t-il dépasser par la situation. « Qu'est-ce que tu veux que je fasse pour que tu ailles mieux ? » Il hésite une seconde avant d'ajouter. « Arthur, écoute-moi bien, est-ce que tu veux que j'appelle quelqu'un qui pourrait t'aider ? Quelqu'un de formé pour ce genre de situation ? »